Au début de l'année, le vortex polaire stratosphérique se présentait sous son meilleur jour, il était extrêmement froid et bien développé. Au cours de la deuxième quinzaine de janvier, il a commencé à s'affaiblir, son centre s'est en partie déplacé hors de la région polaire proprement dite. Il ne s'agissait toutefois pas d'un réchauffement marqué, d'un “major warming“. Mais un tel événement se dessine pour les jours à venir.
Un vortex polaire concentré
Actuellement le vortex polaire stratosphérique est en pleine forme, avec des températures comprises entre -70 et -65 degrés dans sa zone centrale. Une forte bande de vent d'ouest l'entoure.
Fig. 1: Températures actuelles à 10 hPa (env. à 30 km d'altitude); Source: meteociel
Fig. 2: Vent actuel à 10 hPa (env. à 30 km d'altitude); Source: meteociel
Du changement pour la suite
Pour les jours à venir, les modèles sont toutefois assez unanimes, de grands changements auront lieu ici la semaine prochaine. Un "major sudden stratospheric warming" se produit statistiquement tous les deux à trois ans pendant l'hiver dans l'hémisphère nord, la dernière fois c'était début janvier 2021. Un tel événement se caractérise par une augmentation marquée et à grande échelle de la température dans la stratosphère en l'espace de quelques jours. Et c'est exactement ce qui se passe aujourd'hui!
Fig. 3: Indice prévu du vent moyen zonal au niveau 10 hPa. Positif par vent d'ouest, négatif par vent d'est; Source: ECMWF
D'ici samedi prochain, les températures au niveau 10 hPa augmenteront jusqu'à -20 à -15 degrés, soit un réchauffement de 50 degrés ! Selon les dernières données à disposition, les restes du vortex polaire seront repoussés et se trouveront alors au-dessus de l'Europe. Ce réchauffement massif entraînera également des changements radicaux dans les conditions de circulation. Les vents d'ouest qui dominaient jusqu'alors s'affaibliront et commenceront finalement à s'orienter partiellement vers l'est. Les calculs montrent ensuite une courte phase de récupération, suivie d'un nouveau réchauffement.
Fig. 4: Températures à 10 hPa (environ à 30 km d'altitude) le samedi 18 février; Source: meteociel
Fig. 5: Vent à 10 hPa (environ à 30 km d'altitude) le samedi 18 février; Source: meteociel
Qu'est-ce que cela signifie pour la suite de notre hiver ?
Pour le reste du mois de février, probablement rien. Le phénomène décrit ci-dessus a lieu à haute altitude dans la stratosphère, alors que les phénomènes météorologiques se déroulent un étage plus bas dans la troposphère. Toutefois, ces deux couches peuvent interagir entre elles, surtout pendant l'hiver. Avec un certain temps de latence de plusieurs semaines, les modifications des conditions d'écoulement dans la stratosphère ont également une influence sur la tropopause et sur le jet-stream qui passe juste en-dessous. Celui-ci peut ainsi s'affaiblir et, par la suite, former des méandres plus prononcés. Dans ce contexte, des situations météorologiques bloquées deviennent plus probables. L'air polaire froid peut continuer à avancer vers le sud, l'air plus doux vers le nord. Pour l'Europe, cela peut signifier un renversement des pressions au-dessus de l'Atlantique, et en effet, début mars, l'indice NAO négatif (North-Atlantic-Oscillation-Index) semble se dessiner. La dernière fois que cela s'est produit, c'était dans la première moitié de décembre 2022. Tout cela se situe encore à plusieurs semaines dans le futur et est par conséquent entaché d'incertitudes. Mais la probabilité d'incursions d'air froid en Europe centrale (sur le bord sud d'un anticyclone situé plus au nord) en mars augmenterait. Personne ne peut bien évidemment encore dire sérieusement si nous serons alors effectivement confrontés à un temps hivernal ou non...